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 TOUCHÉ PAR LA TEMPÊTE : [Hexagone 29]

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Liseth
   
    Féminin
   Nombre de messages  :  253
   Âge  :  103
   Pensée du jour  :  J'aime beaucoup Radis et Aom
   Date d'inscription  :  26/02/2021
    
                         
Liseth  /  Autostoppeur galactique


Un oreiller pour Aom, un foulard pour Jasmin, changer de vêtements, et ben… j'en ai du travail !

Mais avant toute chose, j'ai un petit truc à faire.
 
Liseth
   
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Liseth  /  Autostoppeur galactique


Les Balançoires.

C’était ainsi que s’appelait le bar à tapas dans lequel je me rendais chaque soir. En fait cinq par semaine car il était fermé le mardi et le mercredi.

Les autres jours je m’y installais et commandais pour commencer une pinte de Gwada blonde en happy-hour et une rillette de poisson. Elles le savaient. Chaque soir :

« Salut Clément ! Vas-y installe toi. »

J’allais m’assoir à l’une des deux petites tables, celle du milieu ou l’autre sur le côté.

« Comme d’habitude ? Pinte, rillette ? » disait celle assignée à mon service.

J’aimais bien ça. Ce sentiment d’avoir toujours vécu ici, d’être un habitué. Cela faisait à peine trois semaines que j’étais ici. Trois semaines durant lesquelles, chaque soir, j’allais aux Balançoires.


L’endroit m’avait plu immédiatement.

Une structure en bois, triangulaire, dont le sol jouxtait la route. A l’opposé, l’ensemble se trouvait un mètre au-dessus du sable, la mer ensuite juste après. On y entrait par une pointe du triangle, pas de porte, une simple corde rangée d’un côté qui nous invitait sur la terrasse. D’abord de grosses tables en bois, puis un bar et des cuisines lumineuses au fond de la partie abritée. La moitié extérieure était éclairée d’une constellation d’ampoules multicolores. La plage était facilement accessible depuis le bord de l’établissement longé des dites balançoires, en cordes tressées, où chacun pouvait choisir de se prélasser en regardant la mer.

Une vue sur la baie des Saintes, crépusculaire. Le soleil s’y cachait progressivement derrière des reliefs verdoyants.

J’avais aimé ce lieu au premier regard, c’était celui que je cherchais. Là où les vents m’avaient porté.

Kazemakase. Je me plaisais à dire que c’était ma façon de vivre, que je laissais le hasard des rencontres me faire passer l’existence d’une manière ou d’une autre. Les efforts m’étaient interdits tant que possible, tout comme la volonté d’agir, de tendre vers un but, une reconnaissance ou un succès. Je donnais une impulsion de temps en temps, sur un coup de tête, mais légère, puis je vivais les aléas. Une fois arrivé dans un endroit agréable, j’y restais, le temps d’en avoir marre, alors je redonnais à nouveau une petite poussée pour aller autre part. Plus j’y faisais de rencontres, plus je m’y attachais, plus longtemps je restais.

En vérité je m’ennuyais dans une vie peu glorieuse et facile, j’aimais plutôt bien voyager, mais sans être trop téméraire. J’aimais rencontrer des gens mais j’étais timide. Alors je les laissais venir, je ne me laissais porter seulement parce qu’il m’était impossible de faire autrement. Les gens étaient à double tranchant, parfois attirer leur attention pouvait être terriblement embarrassant. Mais le simple fait qu’ils consentaient à me parler leur donnait déjà une qualité certaine, un tant soit peu humaniste, de l’intérêt pour l’autre. Peut-être qu’ils se sentaient seuls aussi ? A la recherche de quelque chose de nouveau ?

Qu’avais-je à leur offrir ?


Le premier jour de mon arrivée sur l’île m’avait emmené aux Balançoires.


Auparavant j’étais passé à mon domicile temporaire déposer mes affaires. L’étage inférieur d’une villa, bien trop spacieux pour moi seul, mais que j’avais vite envahi de mon quotidien. Une grande cuisine, une grande chambre, une grande salle de bain. Une seconde chambre, inutile. Une terrasse, merveilleuse.

L’extérieur de mon logement me donnait le sentiment que je pourrais passer ma vie ici, pour toujours. Il y faisait tout le temps beau et j’y étais isolé de tout vis-à-vis. Seuls les animaux me regardaient parfois, gênés que je les observe en retour. La basse-cour se composait de deux ou trois poules avec chacune leurs cinq ou six poussins piaillant, d’un couple de ces oiseaux beiges qui roucoulaient en faisant de la flute et de tout un tas d’autres oiseaux de passage, parfois d’un pique-bœuf, immobile. Il y avait aussi un nombre indéterminé d’iguanes, certains vert éclatant d’autres gris et plus imposants, qui s’aventuraient régulièrement à descendre de leurs arbres, prendre le soleil, dans l’herbe la tête vers le ciel avec cet air tout reptilien de kiffer l’instant présent. Ils détallaient sitôt qu’ils sentaient l’œil de mon téléphone qui les photographiaient, flous. Ca bougeait tout le temps, de jour comme de nuit, ça agitait les plantes. En particulier lorsque Jakie et son pote arrivaient en trombe, deux des chiens du quartier qui se baladaient souvent par ici courraient après tout ce qui bougeait. Un chat orange.

Deux gosses passaient par moment décrocher des noix de coco. Ils les ouvraient ensuite. De grands coups de couteau qui épargnaient miraculeusement les doigts, ils finissaient par atteindre la partie tendre, y faisaient un trou pour récupérer l’eau et m’en offraient un verre.

Devant les portes toujours ouvertes de mon repère, une table et des chaises de jardin, deux transats aussi, offraient tout le confort pour y passer mes journées et mes nuits à pianoter sur mon petit ordinateur portable. C’était là que j’avais renoué avec le forum d’écriture et que j’avais créé la formidable Liseth.


J’avais pris possession des lieux puis étais parti de suite, trouver là où j’allais passer mes soirées, où rencontrer du monde, où boire. Cela m’avait conduit directement aux Balançoires et à Julie.

Julie était une des serveuses, elle était grande, belle, toujours souriante et aimable. Elle m’avait indiqué une table, simple, de une à quatre personnes. Il fallait manger quelque chose, obligatoirement, à cause de la crise sanitaire qui bien qu’elle épargnait encore un peu les restaurants de Guadeloupe, donnait quelques règles à respecter. J’avais pris une rillette de poisson et une pinte.

Il y avait aussi Noé qui était grand, beau, pas toujours souriant mais aimable, mixologue, il restait le plus souvent près du bar.

Tout le monde était accueillant, plus que je ne l’espérais...

Il y avait bien cette autre fille, plus effacée qui elle aussi servait à boire aux clients, la mine moins satisfaite.

Je n’avais pas vraiment fait attention à Léonie les premières fois. Elle semblait moins enjouée, moins avenante, Julie l’éclipsait, flamboyante. Léonie était plus capricieuse, plus râleuse aurais-je dit. Ce n’était peut-être que de circonstances. C’était elle finalement qui la plupart du temps s’occupait de ma table et je la constatais plus aimable au fur et à mesure de ses allées et venues. Elle me lançait sourire après sourire, ébranlant chaque fois un peu plus mes remparts de solitude. Innocemment elle m’attendrissait de ses regards. J’avais envie de hurler.

J’ai hurler :

« …LIISEEEEEEETH ! Qu’est-ce que tu fais ?, Hors de moi. Liseth arrête ça ! C’est ma vie que tu racontes… »

J’étais terrifié.

Je venais de me rendre compte que Liseth écrivait ma vie.

J’ai pensé tristement :

« Ne fais pas ça Liseth, n’écris pas ma vie. Je veux être libre comme toi. Inventer mon histoire. »

Liseth avait fait une belle histoire tout de même, elle avait été gentille avec Chamanii.

Allait-elle rendre sa liberté à Chamanii ? Il avait été dur avec elle, il avait aussi été juste quelques fois. Chamanii ne penserait plus à la brûler dans le feu d’Aom, sinon Liseth continuerait à écrire et à exposer sa vie.

FIN.

PS : Cesse de m’embêter ou la prochaine fois ta vie sera un calvaire !
 
Liseth
   
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Liseth  /  Autostoppeur galactique


Oh oui, j’en ai des choses à faire.

Puisque j’ai réglé mes compte avec mon auteur, je vais maintenant m’occuper de moi.

Et oui après toutes ces péripéties j’ai bien le droit de m’accorder un peu de temps, voir même d’imagination.

Je vais me refaire de A à Z. Comme j’en ai envie.

Voyons voir…

Comment voudrais-je être ?

Je suis belle !

Je ne suis plus une gamine. Je serais grande… pas trop grande…

Un mètre soixante-dix.

Ma peau sera bleue, comme le ciel quand il fait beau. Lisse comme l’ozone et sans nuage.

Mes cheveux seront d’un noir d’encre, alambiqués comme les écritures.

Des lèvres charnues et molletonnées pour rebondir sur celles de Morne.

Un nez pas trop prononcé mais avec de grandes narines pour bien respirer.

Et puis des seins ! Pas trop volumineux tout de même, je ne voudrais pas attirer tous ces pervers.

Un ventre bien rond comme un oreiller de plume.

Des fesses… Je ne vous parlerai pas de mes fesses !

Les jambes musclées pour grimper sur les sommets.

Et des pieds, bah des pieds quoi, de jolis pieds.

Quand à mes mains… Je garde les mêmes ! Pour continuer à coudre les plus beaux habits de Babel. Un tout petit peu plus grandes évidemment.

Voilà ça me semble parfait.

Oh ! Et puis… un petit grain de beauté. Là, sur la joue. J’ai toujours voulu avoir un grain de beauté !
 
Liseth
   
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Liseth  /  Autostoppeur galactique


Un oreiller.

Pauvre Aom…

Comme il se torture.

Il a oublié, ce qu’il était.

Il a oublié, que je ne mourrai pas, lui non plus.

Babel ne mourra pas.

Les idées ne meurent pas et sont éternelles, se donnent naissances entre elles, se transforment, se régénèrent les unes les autres.

Les idées sont l’infini, l’infinitif de l’existence, elles… être.

Babel est tout, pour toujours. Babel EST la mort, Babel EST la vie. Babel n’est rien, à jamais.

Les livres ici n’ont pas vocation à être lus, ils sont, juste, ils n’ont pas de but. Ils sont la mémoire de l’existence.

Nous avons cru que c’étaient des livres, ça y ressemble pour nous.

Peut-être que certains s’en rendent compte ? A quoi bon ?

A quoi bon lire, si on peut être soi-même ce que Babel est lui-même : un livre dans Babel ; celui-là n’a pas de fin.

Je vais lui faire un oreiller, qu’il se réveille. Un oreiller... de sable ?
 
Liseth
   
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Liseth  /  Autostoppeur galactique


Je me souviens avant la tempête.

Liseth, elle, tombait de fatigue. Non, je tombais de fatigue. Ce n’est pas moi qui me suis endormie, c’est Chamanii.

C’est ça. Moi, Liseth, je me suis sentie accablée. Alors que Chamanii, lui… a préféré se reposer un moment, c’était trop pour moi. Pour lui. Pour elle ?

Tout est confus. Qui écrit ? Ca ne peut pas être lui. Je suis libre. Mais je ne voulais pas dormir moi. Me serai-je trompée dans mes mots. C’est impossible, je me serais corrigée. Aurait-il changé mes mots ? C’est impossible, il est allé s’allonger.

Seraient-ce… les autres ?

Oui ! Je me souviens !

C’est affreux ! Ce sont eux ! Pasiphae et Mahendra, ils m’ont… écrit !

Je me souviens c’était terrible…


Comment est-ce arrivé ?

Je me revois dans mon hexagone, enchantée par mon nouveau corps de jeune adulte, je chantais comme l’éternelle enfant que j’étais. Un truc comme : « La lala la-la la la LA !»

Je fabriquais l’oreiller. Pour Aomphalos, le pauvre il avait oublié…

La page immense du livre-lac prête à accueillir le sable, j’avais brodé le A et l’Ω de la page, recouverts de fils fluorescents, chacun d’un coté de l’oreiller. Ils brillaient, c’était beau. Puis la troupe de Languette avait ramené le sable de l’oasis. Une fois versé, j’avais scellé le tout et mon œuvre achevée, j’avais décidé, écrit, que les broderies possèderaient une capacité extraordinaire. Aom’ pourrait s’en servir pour voir l’avenir dans son sommeil, il aurait su alors qu’il ne mourrait jamais.


Et c’est là que tout à commencer à déraper.

Chamanii, je crois, ou bien était-ce moi, l’un de nous a voulu essayer l’oreiller. Chamanii s’est senti mal. C’est comme si, il avait vu, il  savait que la tempête allait arriver. Il a subit la vague du temps de plein fouet, du passé et de l’avenir en pagaille.

Il a dit : « Liseth doit se reposer. »  

Mon dieu c’est horrible. Je me suis retrouvée tremblotante, fiévreuse sous un fauteuil, dans une mare de thé. J’entendais des « slurp ». J’ai revu, je crois, le parfum de Jasmin me protéger dans mon délire.

A cet instant là j’avais compris que j’avais été écrite.
Je crois avoir lutté en vain contre cette fatalité : « Je m’écris… ».
Ou bien était-ce un désespoir : « Je suis écrite… »

Alors tout est devenu sombre et granuleux. Dans mon cauchemar j’ai vu Aom. Par intermittence. Dès qu’il apparaissait je lui hurlais, terrorisée, comme si ma vie en dépendait : « DE QUELLE COULEUR SONT MES YEUX AOM ? DE QUELLE COULEUR SERONT-ILS ? » Il ne répondait pas.

Apres le cauchemar, je me suis réveillée, dans mon hexagone, la tête posée sur le coussin brodé. Je me suis dirigée vers la demeure d’Aom, l’oreiller en main. J’ai constaté l’ampleur des dégâts. La tempête était passée.

Aujourd’hui je me demande qui je suis. Liseth ? Chamanii ? Pasi ? Babel ? Mahendra ? Suis-je Aomphalos dormant sur cet oreiller ?
 
   
    
                         
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