Bonjour à tous,

Je suis tombé sur cet article :
https://www.actualitte.com/article/monde-edition/stephane-bourgoin-le-specialiste-des-serial-killers-serial-menteur/100636

Très intéressant. Je résume en quelques mots.
Stéphane Bourgoin, l'homme qui a écrit énormément de livres sur les sérial killers raconte sur les plateaux télé et dans ses livres que cette vocation lui est venu suite à l'assassinat de sa compagne par un serial killer aux US dans les années 70.
Il raconte aussi qu'il a rencontré plus de 70 serial killers, qu'il a travaillé avec le FBI etc..
Et il vient d'avouer il y a quelques jours après avoir été démasqué qu'il avait tout inventé (ou presque).
Qu'il était un gros mytho.

Quand on raconte des histoires, ne finit-on pas par s'en raconter ?

Voila, je trouve que cette anecdote est amusante et invite à la réflexion sur l'écriture.

Bonjour,
Ce n'est pas vraiment du ressort de l'écriture ça, ce monsieur était avant tout un escroc qui mentait pour se vendre. A classer dans la même catégorie que les médiums. Ces gens mentent à dessein, ils s''appuient sur les attentes des autres pour les manipuler.
Dans le genre mensonge littéraire y a une histoire avec une fille, des loups et la seconde guerre mondiale, et tout les livres des politiques ( vous avez déjà lu un livre de Ségolène Royal par exemple ).
Après est-ce que Sir Arthur Conan Doyle s'est pris pour un détective et Tolkien pour un hobbit ? Je ne sais pas.

Salut,
Je ne suis pas complètement d'accord avec toi.
Bourgoin comme la fille de "survivre avec des loups" (Misha Dafonseca) ou Lobsang Rampa (il se faisait passer pour un lama tibétain mais c'était un plombier londonien, le 3eme oeil était un de mes bouquins préféré ado) ne sont pas à mon avis des escrocs.
Je crois qu'à moment donné ils commencent à arranger, à embellir et après ils finissent par croire à leurs histoires.
Ils sont souvent dépassé par leurs mensonges.
Je crois qu'il s'agit plus de malades que de malhonnêtes.
Je ne pense pas que tous les écrivains sont comme ça.
Mais je trouve très intéressant.

Faire de sa vie une oeuvre de fiction, c'est peut être là le comble de l'écrivain !

Han, misère ! Je le trouvais convaincant dans ce qu'il disait. J'aimais bien l'écouter parler, ce m'sieur.

Bon, eh bien, on peut dire qu'il produit des fictions réussies, c'est déjà ça.

Il y a des écrivains qui ne se cachent pas d'inventer et qui en plus foirent leurs bouquins. :p

Reste à savoir où l'on place l'escrotomètre et le mythomètre. Est ce que la nuance se base entre savoir que l'on ment ( escroc ? ) ou ignorer que l'on ment ( mytho ? ) ?
Dans ce cas comment savoir, que ce soit pour un médium-profiler, un plombier ou un politique, dans quelle mesure ils croient en leur fable?
Et comme il est quasiment impossible de le savoir, comment se positionner face à ça, faut il se positionner? Peut être pas, peut être le plus intéressant c'est de comprendre ce qu'il se passe dans la caboche de ces gonzes pour en arriver là?

Mais cette question n'a pas lieu d'être, un mytho et un escroc mentent. Que ça soit conscient ou non, le résultat est le même, ils mentent.

Mytho et écrivain, ça n'a rien à voir, l'écrivain, s'il sait raconter des histoires, ne croit pas qu'elles sont vraies et n'essaie pas de faire croire qu'elles le sont (loin s'en faut). Ou alors je n'ai pas compris la question d'origine.

Izuchux a écrit:

Mais cette question n'a pas lieu d'être, un mytho et un escroc mentent. Que ça soit conscient ou non, le résultat est le même, ils mentent.

Ca dépend de l'angle d'observation.
Si on cherche juste à trancher "vrai" / "faux", alors oui le résultat est le même

Mais il y a des différences
Un affabulateur ne sait plus toujours très bien où est la vérité et où est ce qu'il invente, et son but n'est que de vivre une autre réalité.
Un escroc sait très bien, et a une idée en tête, qui est de tromper autrui, pour l'une ou l'autre raison.
Le mythomane sait qu'il ment mais ne peut s'en empêcher, et n'a pas forcément d'autre but que voir si ses bobards sont crus.
La raison et la finalité ne sont pas les mêmes...

Un écrivain qui ment consciemment pour faire sa publicité n'est pas dans le même cas de figure qu'un autre qui s'embrouille entre réalité et fiction.
Pour le public, ça peut être pareil, mais si on les place devant un psy, le diagnostic ne sera pas le même.

cendrars

peut être qu'il n'a jamais pris le transsibérien ni mis les pieds à new york

et peu importe

Pour ceux que cette histoire intéresse :

Excellent je trouve ça très intéressant que l'auteur lui-même soit autant rentré dans l'univers de ses histoires - ça fait penser aux nombreux livres et nombreuses séries qui montrent comment l'étude des criminels peut pousser à en devenir un (Hannibal, Killing Eve, ...) !

Après autant de mensonges, on ne saura jamais si le mensonge lui-même était intentionnel ou non...

Pour aborder le sujet d'une autre façon, il pourrait être intéressant d'envisager le cas des souvenirs induits. Les personnes a qui on a induit ces souvenirs sont ils des mythomanes alors même qu'ils ne sont pas à l'origine de l'histoire qu'ils pensent avoir vécu ?
(exemple : les personnes victimes d'un traumatisme auquel des thérapeutes ou des policiers non formés finissent par faire rentrer un scénario dans la tête de façon volontaire ou non)

Notre mémoire et notre vision de la réalité nous semblent stables parce que nous n'avons pas de réel moyen de faire autrement que de compter dessus. Mais qui n'a jamais assisté à une discussion (parfois houleuse) entre deux personnes ayant vécu le même évènement et ne s'en souvenant pas de la même façon ?
(exemple : papy et mamy qui s’engueulent pour savoir si la grande tente Yvette était présent à leur mariage ou déjà morte à ce moment là)

Notre cerveau a horreur du vide et au fur et à mesure que notre mémoire s'efface, il comble les trous avec de l'imagination plus ou moins raccord avec la mémoire fiable qui borde ce trou. Puis un autre bout s'efface, et il recommence. À la fin quelle part de souvenir et quelle part de re-création reste t'il dans notre mémoire ?
(exemple : ces moments troublants où on est convaincu d'avoir posé ses clefs sur le petite meuble dans l'entrée alors qu'en fait, pas du tout)

Et quand le travail d'auteur/vendeur d'histoire consiste à se créer un personnage autant qu'à créer une histoire, au bout de combien de remémoration de cette histoire celle ci finit-elle par acquérir la densité d'un souvenir ?
(exemple : peut-être bien le cas de départ de cette discussion)

Je n'ai les réponses à aucune de ces quatre question plus ou moins liées. Si vous pensez en avoir, à vous de jouer.

Bourgoin a menti sans vraiment mentir.

Il côtoyait une prostituée à l'époque et l'a considérée comme "sa petite amie".  (qui ensuite s'est fait assassiner).

En revanche, il a vraiment plagié un auteur sud-africain, je crois, sur un de ses chapitres; c'est le seul véritable scandale dans l'affaire.

Il a aussi menti sur une formation qu'il aurait suivie auprès du FBI. Renseignement pris : personne ne le connaît et ne l'a jamais connu au FBI.

Il a aussi exagéré sur le nombre de psychopathes qu'il a eu le privilège d'interviewer. Ils seraient au nombre de seulement 6 ou 7 quand lui-même prétendait en avoir interviewé plusieurs dizaines. En réalité, il a compté tous ceux qu'il a croisés ou vus dans les couloirs de la mort.

Les spécialistes du domaine reconnaissent toutefois la qualité synthétique de ses livres. Bourgoin s'est beaucoup documenté sur le domaine,  ça tient très bien la route, et ses bouquins sont une une mine d'informations.

olknox a écrit:

Les spécialistes du domaine reconnaissent toutefois la qualité synthétique de ses livres. Bourgoin s'est beaucoup documenté sur le domaine,  ça tient très bien la route, et ses bouquins sont une une mine d'informations.

Vrai j'en ai lu un c'est effectivement très bien documenté et quand il parle de sa visite au couloir de la mort dans une prison au Texas, on a des images de lynchages et autres règlements de compte violents qui resurgissent et des films comme "la poursuite impitoyable" avec des foules hystériques et haineuses se rassemblant pour une chasse à l'homme collective.
Aussi ce fétichisme autour du meurtre et du meurtrier s'exaspérant à chercher à acheter des dessins du condamné attendant dans le couloir de la mort, des objets lui ayant appartenu, des photos de sa famille et sont toutes l'objet d'un marché très juteux aux USA axé sur le morbide et le sensationnel et faisant quasiment l'objet d'un culte. On pense aux cérémonies et autres manifestations animistes s'exerçant lors de certains enterrements et où le fétichisme est présent aussi bien sûr: ce qui vu du côté occidental nous paraîtrait morbide et primaire.
Disons qu'on passe de la paranoïdie "j'aimerais bien être un écrivain connu par mes livres et un sujet qui me passionne ce sont les serials killers" à une forme de paranoïa stabilisée dans lequel il fait rentrer l'assassinat fictif et supposé de sa femme par un serial killer, les nombreuses rencontres avec beaucoup de serial killer, le fait d'avoir reçu une formation du FBI etc.
C'est une pathologie courante, assez mineure et très répandue et le fait d'être aussi éditeur l'a aussi aidé à se propulser en avant de cette manière-là. Il doit se situer entre l'affabulation et la mythomanie mais là on part d'un fait concret dont il a été vraisemblablement témoin qui a du beaucoup le remuer et c'est plus de l'affabulation que de la mythomanie je crois... Il doit pas être très atteint donc pas vraiment paranoïaque au sens clinique du terme puisqu'il a reconnu finalement lui-même qu'il avait raconté des histoires

Il y a aussi des auteurs qui voyagent depuis leur lit et se convainquent qu'ils ont physiquement mis les pieds dans tel ou tel endroit. Et certains diront que, par définition, un écrivain est un mythomane. L'honnêteté du geste fait toute la différence...

Est-ce que Blaise Cendrars a vraiment pris le trans-sibérien jusqu'à Vladivostok ? Raymond Roussel parcouru l'Europe dans une roulotte ? On n'en saura jamais rien, une partie doit être probablement vraie mais qu'ils l'aient fait ou pas cela aura assuré leur célébrité
Par contre Rimbaud ne s'est jamais vanté publiquement de son vivant d'être allé à Aden pour faire le trafic d'esclaves