Bonjour Damien.

Je n’ai pas le même dysfonctionnement que toi en ce qui concerne l’imagination, la représentation de ce que je lis ou de ce qu’on me raconte, en totalité. Mais je l’ai partiellement.

Mon défaut de représentation ne concerne que les visages. C’est de la "Prosopagnosie". Je navigue en fait entre Prosopagnosie et Prosopamnésie. La différence est subtile, mais non moins réelle.

Je peux tout me représenter, sauf les visages. C’est aussi valable quand je rencontre quelqu’un. Si au bout d’une heure de conversation avec la personne, je ferme les yeux, je suis incapable de la décrire.

Pareil quand je croise quelqu’un que je connais bien dans la rue, il m’arrive de ne pas le reconnaître du tout. Ça me joue pas mal de tours pendables surtout dans l’enseignement. Je suis incapable de reconnaître mes élèves une fois qu’ils sont sortis de l’amphi.

Donc, non, tu n’es pas le seul à avoir un "défaut" de représentation.

Chacun son truc hein ?

En toute amitié, Philippe.

J’ai aussi un ami dans ce cas et, ce qui m’a le plus étonnée, c’est qu’il a longtemps cru que c’était le cas de tout le monde et que les gens qui parlent « d’images dans la tête » employaient juste une figure de style, ou quelque chose du genre.
En même temps, c’est difficile de se savoir « différent » là-dessus, vu qu’on a aucun moyen de visiter la tête des autres pour comparer.
L’autre truc dingue (pour moi), c’est qu’il est, de ce fait, incapable de décrire des gens, une scène… Puisqu’il ne peut pas se la représenter. Il a juste pu donner la couleur de cheveux et le fait qu’elle porte des lunettes au sujet d’une amie commune, parce qu’il le sait, mais il est incapable de la décrire puisqu’il ne peut pas la visualiser. Mais avec de la concentration, il peut se représenter des formes géométriques, par exemple. J’avoue que ça m’a beaucoup impressionnée.

Mais sinon, ça ne l’empêche pas du tout de beaucoup (et bien) lire, de faire du rôleplay, d’écrire un peu aussi… Il aime bien les livres audio, d’ailleurs ! Ce n’est donc pas du tout une fin en soi, juste une manière différente d’appréhender le monde.

Et ben, ça en fait des mots compliqués. Je me suis toujours dit que chacun avait sa ''forme d'imagination'' à lui, tout simplement, sans qu'il n'y ait besoin de ''diagnostiques'' et autres ''troubles''... (désolée pour la digression, mais j'avoue que je ne comprends absolument pas le besoin de beaucoup de gens d'avoir à tout prix un mot à caser sur chaque situation).

Personnellement, quand je lis comme quand je rêve d'ailleurs, je n'arrive pas du tout à me représenter les personnages. Je connais les mots, je sais ce qu'ils signifient, mais aucune image n'arrive, les personnages restent des flous indistincts. Idem dans mes rêves d'ailleurs, je n'ai que des silhouettes floues, rien de plus.
Par contre, je n'ai aucun problème pour visualiser les paysages et m'y projeter. De même qu'en cas de description d'odeurs, de bruits, de perceptions, de sensation, etc... je me projette totalement dedans comme si je ressentais tout ça moi-même. Lorsque je rêve, il n'est pas rare que je me retrouve seule dans des endroits, voire même de me retrouver souvent dans certains endroits en particulier, au point que s'ils existaient IRL, je pourrais les arpenter sans aucun soucis.

Mais même si ce n'est pas la ''norme'' en matière d'imagination, j'avoue que ça ne me dérange pas pour autant. Mon cerveau fonctionne simplement de manière différente, et lorsque j'écris, mes personnages sont très souvent secondaires par rapport au lieu ou à l'histoire.
Côté lecture, ça ne me gêne pas non plus. Par contre, c'est sûr que ça va influer sur mes goûts. Je me projette très facilement dans du Lovecraft ou dans du VanderMeer, parce qu'il y a beaucoup de description de lieux, d'odeurs, de sensations. A l'inverse, j'ai lu ''Ça'' de Stephen King à plusieurs reprises, la première fois quand j'avais 11 ans, et je me suis ennuyée. J'ai beaucoup aimé le début, quand le gosse décrit sa peur de la cave à cause de l'obscurité, l'humidité, l'odeur... quand il fait le parallèle avec la bouche d'égout. Par contre pour toute la suite des événements, notamment la description des monstres, ça m'a laissée de marbre là où tous mes amis ont franchement flippé.

Sujet fusionné avec celui sur l’aphantasie.

Cela peut sembler être une capacité qui te manque, mais tu as sûrement une capacité que d'autres n'ont pas en compensation. Les introvertis par exemple sont connus pour avoir une capacité d'analyse supérieure à la moyenne. Comme pour les aveugles, les neurones non utilisés ont été affectés à d'autres activités.

Dans une note plus positive, il vaut mieux apprendre qu'on a cet handicap que d'apprendre qu'on est psychopathe.

J'ai un ami qui s'est découvert aphantasique en regardant une vidéo sur YouTube, avant il pensait que tout le monde était dans son cas, et du coup il a réalisé que quand on dit "imagine que…" c'était à prendre au pied de la lettre ! Du coup, il n'aime pas trop lire, parce qu'il n'a aucune image donc il a du mal à suivre ce qu'il se passe. Il m'a dit aussi qu'il n'imagine pas non plus les émotions où les sensations. Par exemple, si moi j'imagine toucher un arbre, je peux imaginer la sensation de l'écorce : lui, non. Dans sa tête c'est tout noir. Du coup, il a aussi des difficultés à dessiner. Et quand il rêve ben, il rêve sans images, c'est plus des sensations vagues.

Avec ma compagne, on s'est rendues compte assez récemment qu'on incarnait les deux extrêmes.
De son côté, elle est aphantasique. Elle ne se souvient quasiment jamais de ses rêves. Quand elle pense dans sa tête, par exemple en marchant, elle va penser à des choses très prosaïques, genre les listes de course, le boulot, des choses toujours concrètes. Il faut dire que question intelligence pratique, elle se pose.
Ca ne l'empêche pas non plus d'être une grande lectrice, d'apprécier beaucoup les univers qui stimulent l'imaginaire. Seulement, elle ne les vit pas du tout de la même manière que moi.

Moi, à l'inverse, je passe mon temps dans du daydream et dans toute sorte d'exercices imaginatifs. Mais, étant donné que je fais partie de la joyeuse famille des Aspergers (allez, on rajoute une couche de diag à tout ça !), c'est une espèce de mélange de tout. Les sensations, les images, tout y est. Ajoutez à ça le fait que les musiques m'évoquent des images, que les goût et les odeurs ont des couleurs, et vous aurez sans doute un aperçu du bordeeeeeel que c'est ! Quand je lis, c'est pareil : derrière chaque mot, il y a un monde. Et ça part dans tous les sens. Il m'arrive souvent de digresser en pleine lecture et de noter des trucs dans mes carnets en même temps. Et je vous jure : c'est quand même une activité de repos, pour moi

Avec la nature de cette imagination, je m'amuse énormément avec mes rêves : à force, j'arrive à créer des choses fixes et à avoir du contrôle sur mes actions. Souvent, quand le stress est trop fort, je m'imagine en train de marcher dans une forêt ou en train de voler (avec toutes les sensations que ça présuppose).

Bref, deux univers qui s'opposent et qui pourtant, cohabitent très bien dans notre couple

Jedewyn a écrit:

Les sensations, les images, tout y est. Ajoutez à ça le fait que les musiques m'évoquent des images, que les goût et les odeurs ont des couleurs

C'est la synesthésie, ça, j'crois !

Maîtriser ses rêves, je crois qu'on peut tous le faire avec de l'entraînement, mais ça ne me tente pas du tout ! Je voudrais garder le côté magique des rêves (même si j'imagine que la sensation doit être assez magique quand on peut les maîtriser ; deux magies différentes quoi). En tout cas, avoir toutes ces sensations doit à la fois être pesant parfois et super cool en même temps !

.

Aphantasie aussi (hyper deg quand je l'ai appris). Mes rêves sont d'autant plus intenses émotionnellement car bizarrement je peux visualiser(moyen rare)/ressentir au toucher(très rare)/entendre des trucs (rare) et que je peux pas reproduire par l'effort. J'ai fait 3 rêves dans ma vie où je volais et je pouvais voir tout le paysage défiler et ct juste trop bien. Je fais quelques rêves conscients ; moins j'ai de contrôle, plus j'ai de sensations et de détails. Ça rend les fins de rêve complètement abstraits en général.