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 Cette fiche de lecture qui m'avait vraiment découragé...

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AlbertCamus
   
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   Pensée du jour  :  Plutôt 1000 fois mourir en Martyr du manque d'inspiration et de l'incapacité à écrire en général (avec tous les doutes, les hésitations, et les prises de têtes...) que d'aller se décérébrer dans les bars ou dans les boites !
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AlbertCamus  /  Tycho l'homoncule


Bonjour à tous Smile


Suite à un concours de nouvelles auquel j'avais participé en 2005, j'avais reçu la critique suivante qui m'avait démoralisé:

"Le lecteur ressent une gêne à cause du décalage entre l'annonce, l'épigraphe, les notations poétiques, et le prosaïsme, la banalité affichée (la première phrase, par exemple)

De même, l'activité du personnage (corriger des copies) est en décalage avec les expressions valorisantes : "réajuster les axes des vies et les courbures de vicissitudes"... Dès lors, le personnage est moins crédible d'autant que des clichés ("qu'il aimerait sans doute transmettre jusqu'à sa mort") renforcent la banalisation. Pour le lecteur il est un  stéréotype (le professeur, Troisième République)...

Il y a page 4 de jolies formules, dans le goût de Malraux, à la poésie un peu philosophique. Mais elles ne peuvent pas cohabiter avec le type de notations : " au bout de 25 minutes... il mit 9/20... vers 9h38..., etc..." On est entre deux récits très différents (trop différents)

L’enchainement des épisodes est très bien fait à partir des pages 6,7.   "



J'ai eu l'impression en lisant ça qu'en matière de création littéraire, l'intégration de normes (bien qu'elle ne s'y réduise bien évidemment pas) était indispensable, et que somme toute, la liberté de l'écrivain n'est en un sens jamais absolue: il faut toujours veiller à ne pas créer d’incompatibilités de tons, de styles, de registres ou encore d'univers... Ce qui m'est principalement reproché ici il semblerait. On ne fait pas n'importe quoi n'importe comment.

Et cela soulève la très difficile question de l'harmonie , du jugement du goût, de l'objet esthétique, de ce qui peut légitimement être considéré comme beau...

C'est drôle, j'ai 5 ans d'études de philosophie derrière moi, et malgré tout je n'arrive pas vraiment a tirer de conclusions, malgré toutes les connaissances théoriques que je peux avoir, pour ce qui est de la pratique littéraire, de l'esthétique littéraire.

On parle parfois de "licence poétique". Dans quel cas sera t on autorisé à en parler de façon juste, et dans quel cas devra-t-on considérer qu'il y a sous la plume d'untel, soit une faute de gout, soit d’oreille, soit de style, soit de registre?...

Voici le le lien de mon texte (dont je l'avais déjà dit, je suis très peu fier, mais il date tellement ) si l'on souhaite s'y reporter :

http://jeunesecrivains.superforum.fr/t41913-nouvelles-a-camus


Merci beaucoup à tous Smile
 
OrsonWilmer
   
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OrsonWilmer  /  Hé ! Makarénine


Sur la critique en question, même si elle est négative, elle est en même temps plutôt constructive. C'est déjà appréciable en soi.

Sur ta question de fond, je ne raisonne pas vraiment en termes de norme, mais plutôt en termes de choses qui fonctionnent et de choses qui ne fonctionnent pas. On pourrait ergoter sur la définition de "fonctionner", mais je m'en tiendrai ici à la définition intuitive.

Même si on est tous différents (lieu commun éculé s'il en est), nous sommes biologiquement convergents, y compris le cerveau et notre psyché. La meilleure preuve à cela c'est notre capacité à l'empathie. On est capable avec un taux de fiabilité assez élevé de ressentir les sentiments d'autrui.

J'ai tendance à voir les normes sous un aspect empirique. Une collection de choses qui "fonctionnent", qui ont été éprouvées par le temps. Les grands dramaturges grecs ont montré que les archétypes fonctionnaient dans le sens où ils permettent au public de s'identifier ou à défaut de cerner assez facilement un ensemble de personnages (pouvant être nombreux).

Compte-tenu de ceci, le job de l'écrivain est davantage de sélectionner un ensemble de "normes", de techniques qui fonctionnent de façon à ce qu'elles fonctionnent entre-elles. Une incohérence dans une intrigue peut être vu comme une liberté scénaristique, mais ça reste un problème du point de vue cognitif qui peut être perçue par un grand nombre de lecteurs.

Donc si on a le souci de captiver le lecteur, de lui faire ressentir des émotions, etc, (et donc de faire appel à certains ressorts psychologiques et cognitifs communs chez la plupart des gens), il est sans doute préférable de passer par ce qui peut être appelé comme des "normes", mais qui sont plutôt des recettes déjà testées de trucs qui fonctionnent.

Est-ce là une entrave à la liberté artistique ? Certainement, dans l'absolu. Mais il reste aussi possible d'innover dans le cadre des normes.
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Irvyn
   
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Irvyn  /  No fun allowed


Hoy par ici !
Je vais sans doute dire des choses très bateau, mais il ne faut pas se laisser décourager si facilement, surtout dans le domaine de l'art.
Sinon oui, l'art est normé. Il existe de très nombreuses règles, à commencer par celles de la langue, et s'en défaire demande toujours une raison valable. Se détacher d'une nomenclature juste pour clamer son unicité est souvent vu comme prétentieux et sans grand intérêt. Une oeuvre doit avoir une identité propre, ce qui passe par la recherche d'une esthétique : un ton, un niveau de langue etc. Tu peux évidemment inclure des termes "étrangers". Je pense à Lovecraft (premier nom qui me vient), qui est connu pour utiliser un anglais d'époque mais aussi des termes tombés dans la désuétude, le tout sur une tonalité plutôt orale. Seulement voilà : il le fait sur toute la longueur du récit. Ce n'est pas "un passage ceci, un passage ça".
On peut comparer ça à la beauté oui, qui est toujours perçue à travers des filtres, des standards. Si l’œil humain apprécie généralement plus la symétrie des objets, il en est de même avec l'art : quelque chose d'ordonné, avec un parcours bien défini et une vision unie.
Le beau, ça se construit !
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AlbertCamus
   
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AlbertCamus  /  Tycho l'homoncule


Merci pour vos réponses.

Est ce qu'à trop vouloir un ordre, une logique, une unité, on ne tombe pas facilement dans le déjà vu? L'ennui c'est lorsqu'on se voit reprochées des maladresses que subjectivement l'ont tient pour de l'innovation (contestable souvent).

Il a été question dans cette critique de "clichés" . Mon expérience de l'écriture me montre qu'effectivement éviter les clichés est difficile, qu'il s'agisse des clichés de langue ou des clichés thématiques.

Et lorsque je les évite j'ai le sentiment, plus ou moins juste, de tomber dans la maladresse, l'incongru.
 
OrsonWilmer
   
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OrsonWilmer  /  Hé ! Makarénine


C'est très difficile de réellement innover. C'est réservé aux génies. Pour le commun des écrivains, il vaut mieux se contenter de reformuler, d'adapter, éventuellement de perfectionner ce qui existe déjà sans que le matériau ayant servi d'inspiration soit trop visible. Après, la combinatoire dans l'écriture est telle qu'il est toujours possible d'apporter sa petite touche personnelle, mais il ne faut pas se leurrer, ça reste marginal, même si ça peut être suffisant pour se démarquer d'autrui.

Donc forcément, dans ces conditions, il est très facile de tomber dans ce qui est communément appelé les "clichés". Ils ont mauvaises presse, c'est certain, même si je trouve que les critiques sont un peu sévères à leur encontre. Lorsqu'on utilise sciemment un cliché, l'essentiel du talent revient souvent à dissimuler, à maquiller ce cliché. Mais un petit cliché ou deux, qui servent l'histoire, ça n'a jamais fait de mal à personne.

Eviter les clichés, c'est nécessaire aussi. C'est souvent ce qui demande le plus de travail de préparation dans un roman et qui peut même justifier le roman en tant qu'oeuvre. Heureusement, ça ne concerne qu'une fraction de l'oeuvre en général. C'est le truc qui fera que c'est "une oeuvre qui nous tient à cœur".

Mais éviter tout le temps les clichés ça ne peut pas "fonctionner" dans le sens de mon précèdent message. Il y aura trop de risques de déphasage par rapport à la psychologie de la majorité de ton lectorat. Maintenant, si tu écris uniquement pour toi-même avec un but purement artistique, sans chercher à être lu, une approche "100% sans cliché" reste possible, mais l'oeuvre résultante sera sans doute hermétique au plus grand nombre. Mais ça peut être un choix.
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Bohr
   
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Bohr  /  Gloire de son pair


Je pense qu'on peut pas mal se prendre le chou sur des notions de "cliché" et "lieu commun", sachant que, dans l'art, ils demeurent, parfois, inévitables voire indispensables.
Il me semble que c'est sur la chaîne de Stroyteller que j'ai vu une distinction faite entre le "cliché" et le "lieu commun": le premier est un élément récurrent et typique dont on peut jouer à volonté, car ancrant une oeuvre dans un univers, un genre, tandis que le second est le simple témoignage d'un manque d'imagination. Donc, en soi, ce n'est pas une question de l'originalité de ce qu'on montre/raconte mais plutôt de la façon dont on réutilise des briques préexistantes (comme la cape des super-héros, par exemple) pour éventuellement produire quelque chose de nouveau, surprenant ou attractif.

Après, chercher à tout prix l'originalité est en soi une voie sans issue: de rien, il ne ressortira jamais rien. (oui, j'aime me faire sentencieux, des fois)
Ca signifie qu'à bâtir quelque chose d'entièrement nouveau avec des fondations nouvelles, on risque de perdre de la signifiance (j'entends derrière ce barbarisme la possibilité qu'a le public de se reconnaître ou de mettre du sens dans ce qui lui est montré ou raconté) jusqu'à devenir une pure abstraction formelle.

Reste aussi le cadre référentiel du lecteur (qu'il s'agisse de l'auteur de cette fiche de lecture, a priori instruit mais aussi psychorigide, ou bien d'un inconnu total qui lirait tes lignes chez lui sur son canapé): ce qui est original pour l'un peut être incroyablement convenu, "cliché" pour l'autre, parce qu'ils n'ont pas forcément la même connaissance du genre ou du sujet. Quelqu'un qui ne lit ni ne regarde jamais d'horreur trouvera très astucieux de faire surgir un chat d'un placard pour désarçonner le public, quand, de plus en plus, les vieux routards de l'horreur qualifient même ce procédé de "putassier". Comme le disait ce bon vieux Al, "c'est pas pareil dans deux référentiels différents".

Et comme le disait aussi mon prof d'arts plastiques: "l'harmonie seule ne suffit pas, il faut aussi du contraste, sinon, tu fais juste des monochromes". Et, même si je n'ai pas lu ton histoire, faire alterner des envolées lyriques et des lignes prosaïques, voire tendant vers le vulgaire, ne me choque pas, tant que c'est en adéquation avec le but que tu t'es fixé (faire un effet, par exemple). C'est de ce contraste que naît la vie d'un écrit, pas de la déclinaison jusque derrière l'horizon de codes mille fois ressassés (et souvent bien mieux par d'autres que soi).

A mon sens, ce que tu ne devrais jamais perdre de vue, c'est ce que j'ai appelé "signifiance": laisser la possibilité au public de se projeter. Les résultats d'une séance d'écriture semi-auto que j'avais faite sous rhum martiniquais ont été sans ambiguïté: une fois à jeun, je me suis retrouvé face à une... chose, un objet littéraire autiste et farouche, sans rien auquel m'accrocher pour le déflorer. Bref: un bide! Laughing
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AlbertCamus
   
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AlbertCamus  /  Tycho l'homoncule


Il y a quand même de quoi être sérieusement paumé quand on veut écrire, n’empêche...

Le recul, est à mon sens une notion clé. Mais il faut des années et des années de travail pour ça.
 
Bohr
   
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Bohr  /  Gloire de son pair


Pas forcément.
Ca peut être l'action pure, le passage à l'acte écrit. Car, le recul, c'est bien beau, mais je pense qu'au bout du chemin, on se rend compte de la vacuité de la chose, et on laisse béton.
Si je devais citer une clé - MA clé - ce serait l'indépendance. Ca me fait penser aux tourments de BEPASSIONATE dans Edition et Autopublication ( http://jeunesecrivains.superforum.fr/t46791-avis-sur-lettre-de-refus-pocket-jeunesse ), qu'un commentaire - moins assassin, certes - a laissée comme dans un effet blast.

Ce n'est qu'une critique et une seule! A la limite, pourquoi ne pas critiquer la critique, d'ailleurs? Ce n'est pas parce qu'on désespère d'avoir une critique que nous devons perdre notre esprit critique et les considérer comme des dieux éthérés!
Ils vont à la selle, ont leurs humeurs, leur mauvaise foi, leurs méconnaissances, leurs goûts, leurs principes et visions du monde, qui ne sont pas forcément les nôtres. On ne peut pas plaire à tout le monde.
A noter que d'aucuns s'érigent aussi en défenseurs du bon goût ou de l'orthodoxie de ci ou de ça. Plus ils vocifèrent, moins ils sont légitimes.
N'oublions pas que nous serons toujours plus impressionnés par l'assurance que par la raison.
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Irvyn
   
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Citation :
C'est très difficile de réellement innover. C'est réservé aux génies. Pour le commun des écrivains, il vaut mieux se contenter de reformuler, d'adapter, éventuellement de perfectionner ce qui existe déjà sans que le matériau ayant servi d'inspiration soit trop visible.

Mais, ce n'est pas ça justement, innover ? Partir sur une base déjà faite et la rendre meilleure ? Alors oui, on dit souvent que l'art, c'est la création, mais un artiste ne peut se détacher de ce qu'il connait. Mozart, considéré comme un génie par un quasi-consensus (on ne sait jamais, je laisse la porte ouverte au déni x)), a "juste" manié les règles de son époque. Il les a maîtrisées, puis utilisées à leur plein potentiel. Il n'a pas fait table rase de tout ce qui se faisait auparavant pour donner quelque chose de fondamentalement différent. Il existe des ovnis artistiques, mais à mon sens, "ovni" n'est pas égal à "génie". Un génie, pour emprunter au vocabulaire mathématique, serait plus une valeur aberrante : quelque chose de très au-dessus de la moyenne. Un ovni, en revanche, ne saurait être placé dans un même tableau.

Pour les clichés, honnêtement, on peut en manier sans perdre en originalité. D'autant que le terme a tendance à toucher des éléments propres à un genre. Personne ne reprocherait à un polar de nous faire vivre une enquête, ou que l'épouvante, qui se joue essentiellement autour du non dit, ne soit pas assez claire (ou que le gore se montre trop clair, à l'inverse). Tolkien, l'un des fondateurs de la high fantasy, s'est inspiré des récits fantastiques, notamment des mythologies. On pourrait presque dire que Homère avait écrit de la fantasy bien avant lui, puisque nous avons des personnages qui luttent contre des créatures imaginaires, mais entièrement normales dans son monde. Ce serait une erreur, puisque Homère ainsi que ses lecteurs croyaient véritablement en ces créatures. Il n'a fait que dépeindre son époque. L'épopée, c'est une sorte de fantasy, mais placée dans un référentiel différent.
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OrsonWilmer
   
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Bohr a écrit:
Les résultats d'une séance d'écriture semi-auto que j'avais faite sous rhum martiniquais ont été sans ambiguïté: une fois à jeun, je me suis retrouvé face à une... chose, un objet littéraire autiste et farouche, sans rien auquel m'accrocher pour le déflorer. Bref: un bide! Laughing
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Sinon, l'interrogation que tu soulèves AlbertCamus me fait penser au laius que j'ai écrit à une amie ce matin même :
yahiko a écrit:
La voix intérieure, c'est peut être la chose que l'on n'apprend que par soi-même, par l'observation du monde, de ses introspections, l'expérience de la vie avec ses réussites et ses échecs. Cette voix intérieure, c'est quelque chose que certains auteurs cherchent désespérément à acquérir durant toute leur vie, sans jamais y parvenir. Ils ne font au final qu'aligner des mots, avec talent parfois, mais sans dire grand chose. [...] A toi de la développer et d'en faire quelque chose d'intéressant. C'est à partir de cette voix intérieure que tu pourras te forger un style personnel. Mais y parvenir, ce n'est pas donné à tout le monde. On n'est pas chez les bisounours.

EDIT :
@Nordgia : ton point de vue se tient également. Il est toujours possible de débattre sur le sens de "innover". Mon propos était surtout de dédramatiser, déculpabiliser l'utilisation des clichés, qui si on écoute les nouveaux experts de la critique, sur YouTube notamment, sont une tare congénitale. "Putassier" comme l'a signalé Bohr.
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Salut Camus,

Je me permet de faire à la fois le commentaire et la réponse à ton désarroi d'aujourd'hui.

Je lis d'abord la fiche de lecture, assez lapidaire, et ensuite vais voir ton texte...
Saisissant !
Normalement c'est le genre de texte que je lis jamais, mais là je viens de regarder le premier épisode de Cowboy Beebop, série d'animation où la science fiction est un prétexte pour créer des instants mélancoliques, je dirais carrément, des instants jazz (désolé j'ai pas d'autre mots).

Sans surprise, le style de cette nouvelle me fait énormément penser à l'étranger de Camus, que j'ai du lire au collège, et auquel je n'ai RIEN compris, sinon qu'il a tiré sur l'Arabe parce que l'éclat du soleil était trop fort.
Je suis surpris, maintenant que je suis adulte, je peux faire l'effort, et je me sens toucher du doigt tout ce bazar.

Citation :
Le temps affiche une redoutable fluidité au commencement d’une journée. Le café, l’eau sur le visage, l’univers métallique de la cuisine, l’aspect terriblement aseptisé de la salle de bain, sont comme les témoins de cette fluidité, dont le caractère impitoyable ne fait qu’égaler la douceur.
Mais t'es un génie !
Ah, non, il ne faut pas te le dire, héhé, je suis sûr que tu en es déjà persuadé !

Citation :
Il eut alors la bizarre impression que le silence du lieu s’était inclus de manière saisissante à ce silence que lui-même, avait tant recherché depuis le début de la matinée.
Je bazarderais la virgule, mais c'est parfait. Ça me fait penser à Flaubert : c'est précis et lisse comme une carrosserie de bagnole.

Quant au restaurant indien, où le héros s'introduit sans être accueilli, je me souviens être un jour rentré dans un resto chinois normalement ouvert, mais personne. J'ai appelé, il n'ont pas répondu. J'ai risqué quelques pas vers l'intérieur du resto, et alors seulement je les ai aperçus en train de manger. Ils m'avaient donc entendu, mais ignoré. C'était chelou.
Purée, c'est bien écrit ton truc. Et dernier paragraphe, voilà que le prof songe à déchirer toutes ces copies de philo qu'il corrige. Pourquoi ? ah, peut-être que le soleil brillait trop fort ? On ne saura pas !

Purée c'est vachement bien ce que tu écris ! Comment a-t-on pu rédiger une telle critique ? Pour pouvoir pondre une telle fiche de lecture, il faut que le critique baigne dans le même monde que celui de l'auteur : un monde où on connaît l'histoire des idées sur le bout des doigts, où ça parle d'existentialisme et de trüks dont je n'ai moi-même pas la moindre idée. J'ai le sentiment que dans ce monde-là, il faut absolument trouver une raison à pourquoi l'Étranger a tué l'Arabe, il faut pouvoir tout expliquer, tout cartographier, tout écrire. Le critique parle de l'oeuvre avec la même autorité que s'il l'avait rédigée lui-même. Mais pour qui se prend-il ?

Citation :
Le lecteur ressent une gêne à cause du décalage entre l'annonce, l'épigraphe, les notations poétiques, et le prosaïsme, la banalité affichée (la première phrase, par exemple)
Alors, perso, c'est pas ça ma gêne. Bon, effectivement, le titre a rien à voir, et la citation de Hölderlin me passe au-dessus de la tête. Non, ce qui me gêne, c'est qu'on ne sait pas qui est le héros. On passe le premier paragraphe a essayer de construire une forme là où il n'y en a pas. (tiens, "défendre une forme"....)
Non, en fait, rien de tout ça ne me gêne. La citation de Baudelaire je la trouve super.

Citation :
De même, l'activité du personnage (corriger des copies) est en décalage avec les expressions valorisantes : "réajuster les axes des vies et les courbures de vicissitudes"... Dès lors, le personnage est moins crédible d'autant que des clichés ("qu'il aimerait sans doute transmettre jusqu'à sa mort") renforcent la banalisation. Pour le lecteur il est un  stéréotype (le professeur, Troisième République)...
Personnellement, je suis vite rentré dans le double jeu [ prof normal / héros existentiel ].
Je viens d'apprendre le mot vicissitude, haha toute ma vie je croyais que c'était "vivissitude". Je viens d'apprendre le sens, aussi. Alors du coup, "les courbures de vicissitudes".... aucune idée de ce que ça peut bien vouloir dire. Mais on s'en fout ! Comme a dit Lacan : "Il faut se garder de comprendre".

Le reste de la critique est très constructif. Il faudra que je lise Malraux !

Je suis assez sonné par la lecture, d'abord de la critique, puis de ta nouvelle. J'ai le sentiment d'avoir mis un pied dans un terrain défendu, celui des philosophes poètes et des intellos qui voudraient bien être des philosophes poètes. Ça n'a pas l'air d'être un monde tendre, si j'en crois la critique, mais alors, c'est fascinant !

Tu poses la question éternelle : qu'est-ce que la licence poétique, qu'est-ce que la faute de goût, etc ?

Ça doit pas être la première fois qu'on te le dit, mais je crois que tu te prends beaucoup la tête. Si j'ai bien compris, t'es prof de philo, ou alors tu es en situation de le devenir. Le texte pourrait très bien parler de toi. Ou alors, il parle de tes fantasmes. Enfin, c'est toi qui l'as écris. Est-ce que tu vas laisser un critique te dire si t'as le droit ou non de mettre les termes "9/20" et "ô journée paradigmatique" dans le même texte ?
Je veux dire, il faut péter un coup, quoi. Tu veux plaire aux critiques, réussir un concours de nouvelles ? C'était ça le but de Camus, dans la vie ? Je pose la question, hein, j'en sais rien.

En tout cas je viens de m'inscrire sur ce forum et je ne le regrette pas. Je tombe sur des choses extraordinaires.
 
AlbertCamus
   
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AlbertCamus  /  Tycho l'homoncule


Je ne pense pas être un génie. Pour l'instant tout ce que j'ai c'est un certain talent (et encore pas constant) de la formule poétique. A moi de voir ce que je peux en faire.

Il me semble que le souci principal de mon texte est que mon projet était trop flou, je ne savais pas OU exactement je voulais en venir. Je pense que ne pas avoir de plan (dans tous les sens du terme...) est un des pires fossoyeurs de la création littéraire.  

Le fait de n'avoir pas su où je voulais me diriger est clairement matérialisé par cette incertitude entre deux types de ton dans mon texte. Après est ce que cette contradiction au niveau du ton est la source d'une critique légitime? A priori je dirais oui, et je considère que mon texte serait à réécrire à 80-90%

Si on ne reste pas humble pour toutes ces choses, on est foutu je pense ...
 
Bohr
   
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Je ne suis pas convaincu qu'un plan soit un impératif rigoureux, un objectif me semble parfois suffire.
Sinon, adios toute spontanéité, tout inattendu - interstice où on peut parfois trouver des pépites de génie, précisément.

Et je pense que le seul problème sur lequel tu dois véritablement te pencher, c'est l'objectif: où veux-tu en venir? Que veux-tu raconter? Y a-t-il un contenu, un message qui doit passer?
Le reste, c'est de la technique, entre imitation et expérimentation. (Disclaimer: ce n'est que ma lecture, merci de ne pas appeler à me rouer en place de grève)
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AlbertCamus  /  Tycho l'homoncule


Bohr a écrit:
Je ne suis pas convaincu qu'un plan soit un impératif rigoureux, un objectif me semble parfois suffire.
Sinon, adios toute spontanéité, tout inattendu - interstice où on peut parfois trouver des pépites de génie, précisément.

Et je pense que le seul problème sur lequel tu dois véritablement te pencher, c'est l'objectif: où veux-tu en venir? Que veux-tu raconter? Y a-t-il un contenu, un message qui doit passer?
Le reste, c'est de la technique, entre imitation et expérimentation. (Disclaimer: ce n'est que ma lecture, merci de ne pas appeler à me rouer en place de grève)

La démarche que tu proposes, je l’utilise aussi, mais elle me semble plus adaptée pour une écriture de type poétique que narrative. Je crois que pour l'instant mon point fort est incontestablement la première

Tout en sachant que la distinction entre roman et poésie peut trouver très vite ses limites!... Surtout pour la littérature post-moderne. Quand on regarde Quignard, L. R. Des Forêts, Philippe Sollers, certains textes de Le Clézio...

Mais si on envisage la littérature de genre (King, Grangé, Chattam, Thilliez, etc...) je suis convaincu qu'ils doivent élaborer des plans savants, tellement les intrigues sont complexes.

EDIT:
Du coup, ça m'amène a faire l’observation selon laquelle dans l'ensemble des conseils littéraires donnés un peu partout (ouvrages, internet...), on a l'impression que le type d’écriture privilégié, par défaut, est l'écriture romanesque ou narrative. Au détriment de la poésie. Est ce qu'il y a une explication sociologique à cela? Par exemple le fait que le roman est le genre littéraire considéré comme l'incontournable, le plus élevé, et le plus excellent.
 
Irvyn
   
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À chacun sa méthode, à chacun son style. Personnellement, j'établi toujours un plan dans les grandes lignes, ainsi qu'une chronologie générale (du récit, mais aussi de tout ce qui se passe avant et après, car une histoire se place forcément entre deux périodes). Ça me laisse un squelette narratif, ainsi qu'un vaste terrain pour l'improvisation.
Pour le côté poétique (car j'ai commencé l'écriture par la poésie), ça vient dans le style, la manière d'exprimer les choses et non dans l'idée-même. Mais il m'a fallu beaucoup de temps afin de distiller correctement la poésie dans la prose, sans que celle-ci soit indigeste et/ou hermétique.
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